Le médialab Makery présente la troisième édition de son festival Open Source Body qui aura lieu du 27 septembre au 22 octobre à la Cité Internationale des arts. Editorial.
Dans le roman de science-fiction de Theodore Sturgeon, Les Plus qu’humains (1953), un groupe d’humains aux pouvoirs étranges, comme la télépathie et la téléportation, entre en symbiose pour créer un unique organisme vivant et autonome. Pour Theodore Sturgeon, un être vivant ne résulte pas de la simple addition des propriétés des éléments qui le constituent, mais de l’ensemble des relations entre ceux-ci.
Ce concept de More-Than-Human est aujourd’hui repris par les sciences humaines et sociales pour contrer l’exceptionnalisme de l’humain et ouvrir une voie vers la compréhension des interrelations entre êtres vivants, non-vivants et sociétés humaines.
L’exposition Plus que vivant témoigne des liens entre l’art contemporain, la santé, la recherche biomédicale et l’attention portée à l’autre dans une société post COVID-19. Elle met en évidence la façon dont les artistes se nourrissent des recherches scientifiques dans le domaine de la santé, de la biologie de l’évolution, des biotechnologies et de leurs impacts sur le corps humain, ainsi que des relations de ce dernier avec son environnement.
Ainsi, les artistes Emilia Tikka, Oula A Valkeapää et Leena Valkeapää montrent la co-vulnérabilité des relations entre humains et rennes dans la zone subarctique finlandaise et présentent les effets transformatifs de cette réciprocité sur leur évolution. Maya Minder envisage les humains en tant qu’entités en relation symbiotique avec leur microbiote bactérien et leur environnement. Elle explore le rôle que pourraient jouer les algues dans la transition alimentaire et écologique, ainsi que dans notre évolution future. Clara Jo questionne la recherche sur le Coronavirus et la santé environnementale à l’ère de la mondialisation accélérée. Martin Howse propose des manières d’extraire les minerais rares présents au sein de nos organismes, comme une métaphore de nos sociétés extractivistes. Helena Nikonole et Lucy Ojomoko utilisent le parfum du jasmin pour diagnostiquer la présence d’une maladie, comme une invitation à déstigmatiser les malades.
De la robotique chirurgicale, en passant par la génétique et jusqu’à l’informatique, nous observons aujourd’hui un renforcement des aides technologiques à la pratique médicale, supprimant toujours plus le contact direct entre le médecin et son malade. Dans le champ de la critique féministe, il y a près de 40 ans, la philosophe et primatologue Donna Haraway introduisait le concept de « corps cyborg ». Sa pensée ne cesse d’accompagner les artistes dans leurs recherches sur la technologisation de la reproduction (Shu Lea Cheang), les prothèses et l’augmentation du corps (Adriana Knouf), la robotisation et la télé-chirurgie (Albert García-Alzórriz), ainsi que les relations entre les corps de science-fiction et l’imaginaire militariste (Estelle Benazet Heugenhauser & Cindy Coutant).
Les artistes de l’exposition Plus que vivant identifient la manière dont certains groupes sociaux ou individus peuvent être stigmatisé.e.s ou privé.e.s de leurs droits dans une société normative et validiste. Edna Bonhomme, Nazila Kivi, Jette Hye Jin Mortensen et Luiza Prado redonnent ainsi une nouvelle radicalité à la notion de soins, tout en évoquant la proximité du système techno-médical occidental avec des intérêts puissants.
Ewen Chardronnet & Nataša Petresin-Bachelez
Vernissage le 27 septembre à 19h à la Grande Galerie de la Cité Internationale des Arts avec une performance de Maya Minder et Claudia Stöckli.
Retrouvez l’ensemble du programme du festival ici.
Le festival OPEN SOURCE BODY est une coproduction d’Art2M/Makery/MCD et de la Cité internationale des arts, organisée dans le cadre du programme ART4MED – art meets health and biomedical research co-financé par le programme Europe Créative de l’Union Européenne.