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Les îles Galápagos survivront-elles à l’Anthropocène ?

Un iguane marin se réchauffe au soleil dans l’île Fernandina aux Galápagos. © Cherise Fong

Situées à 1000 km au large d’Ecuador, les îles Galápagos ont compté plusieurs centaines de millénaires d’évolution géologique et biologique en isolement pour devenir le fameux paradis de la préhistoire. Comment va la vie dans l’archipel depuis l’arrivée de l’espèce humaine ?

De notre envoyée spéciale aux Galápagos (texte et photos)

C’est dans l’île Fernandina que j’ai failli marcher sur un iguane marin. Il était allongé au sol, au bord de la colonie, la tête baissée et le corps étendu, immobile et camouflé sur les rochers de lave. Pendant un instant, j’imaginais le sort ironique de cette créature légendaire—le descendant de lézards émigrés du continent sud-américain sur un radeau végétal, qui ont su s’adapter aux rudes conditions de cette île volcanique en s’aventurant dans la mer pour se nourrir d’algues, modifiant et optimisant leur anatomie sur plusieurs centaines d’années, au cours de plusieurs générations—à se retrouver écrasée sans cérémonie par une touriste tellement éblouie par le paysage environnant qu’elle ne voyait pas le trésor qui se trouve à ses pieds.

Heureusement, je me suis redressée à temps. Imperturbable, le dragon préhistorique n’a pas fléchi d’un millimètre, s’est tout juste contenté d’expulser du sel à travers ses narines en absorbant les rayons du soleil équatorial. L’iguane marin est ici chez lui.

Un iguane marin (Amblyrhynchus cristatus) se réchauffe au soleil dans l’île Fernandina.

La célébrité des îles Galápagos tient à ses espèces animales endémiques, évoluées à l’abri du contact humain, intrépides ou impassibles : les tortues géantes et centenaires qui ont inspiré le nom de l’archipel ; les iguanes majestueux et multicolores ; les fous aux pattes bleues et la danse enjouée ; les frégates et leur sac rouge gonflé à la gorge ; les otaries curieuses ; les manchots espiègles ; les crabes rouge vif (les rapides “Sally-pied-léger”) sur les rochers de lave ; les pinsons de Darwin, dont les multiples variétés de becs illustrent bien la radiation évolutive, ou l’évolution d’une espèce en plusieurs selon l’adaptation de chacune à survivre dans un environnement changeant.

Un Sally-pied-léger (Grapsus grapsus) se repose sur les rochers dans l’île Isabela.

Depuis le temps de Darwin, l’archipel des Galápagos a conservé 95% de ses espèces endémiques : selon la Galapagos Conservancy, environ 80% des oiseaux terrestres, 97% des reptiles et des mammifères terrestres, 30% des plantes et 20% des espèces marines des îles ne se retrouvent nulle part ailleurs au monde.

Le fameux fou aux pattes bleues (Sula nebouxii), ici dans l’île North Seymour.
Plus petit mais aux talons plus longs, le fou aux pattes rouges (Sula sula) fait son nid dans les arbres, ici dans l’île San Cristóbal.
Un frégate mâle se gonfle la gorge en essayant d’attirer l’oeil d’une femelle dans l’île North Seymour.

A la confluence du changement climatique

La grande biodiversité des Galápagos, liée à son climat subtropical exceptionnel, est due à sa situation géographique à la confluence de plusieurs grands courants marins : le courant de Humboldt froid venu du sud, le courant de Panama chaud venu du nord et le courant de Cromwell froid et profond à l’ouest, qui apporte une richesse de nutriments qui nourrissent des écosystèmes allant des récifs de corail jusqu’aux manchots.

Périodiquement, le phénomène climatique et cyclique d’El Niño-La Niña vient réchauffer les eaux en apportant beaucoup de pluies, ce qui réduit de manière dramatique les provisions marines d’algues, de phytoplancton et de poissons—que mangent notamment les iguanes marins, les manchots, les fous et les cormorans aptères—et déstabilisent les écosystèmes côtiers où nombre d’animaux, comme les flamants ou les tortues de mer, font leurs nids.

Les rares cormorans aptères (Phalacrocorax harrisi), de superbes plongeurs qui au cours des siècles ont perdu la capacité de voler, sont endémiques aux îles Isabela et Fernandina.
Le manchot des Galápagos (Spheniscus mendiculus), la seule espèce de manchot qui habite au nord de l’équateur, dans l’île Isabela. Sa population actuelle est estimée à environ 2000 individus.

En conséquence des El Niño particulièrement sévères de 1982 et 1997, des scientifiques ont observé certaines espèces d’oiseaux, en manque de nutrition et de ressources, cesser de se reproduire pendant plusieurs années de suite. Les flamants ne trouvaient plus assez à manger dans les lagons. Les iguanes marins seraient allés jusqu’à absorber leur propre masse osseuse afin de rétrécir leur corps et donc leur besoins en alimentation. Beaucoup des iguanes et otaries mâles dominants, déjà préoccupés à défendre leurs territoires respectifs, sont morts de faim pendant ces périodes. Plus récemment, les otaries se sont mises à la chasse collective de grands albacores. S’il existe des écosystèmes marins qui ont réussi à rebondir du choc, on ne sait pas encore si ce sera le cas des cycles à venir.

Le réchauffement climatique ne fait qu’exacerber les phénomènes El Niño. De plus, il augmente l’acidification des océans, ce qui mène au blanchiment des coraux, espèce clé des écosystèmes marins.

Tui de Roy, photographe et naturaliste renommée des Galápagos depuis une quarantaine d’années, se rappelle les grandes patates de corail, larges de plus de 4m et âgées de 500 ans : « Elles sont toutes mortes en ’82. Elles se trouvaient dans la baie de l’île Sante Fe, des patates de corail géantes. Il fallait faire attention de ne pas les heurter quand on s’y approchait en bateau. Aujourd’hui il n’y reste même plus les cadavres. Les gens ont un peu oublié que ces choses ont existé. »

En 1954, un mouvement de magma souterrain a provoqué le soulèvement presque instantané d’environ 1.5 km2 du récif dans la baie d’Urbina dans la jeune île volcanique Isabela. Aujourd’hui, on retrouve encore sur terre les restes des patates de corail blanchies.
Près des patates de corail blanchies, le crâne et la carapace d’une grande tortue de mer.

John McCosker, chercheur en biologie aquatique à la California Academy of Sciences spécialisé dans les îles Galápagos, se souvient de ses expéditions des années 1970, où lui et ses collègues voyaient en abondance une espèce de poisson-demoiselle de la taille d’un doigt humain. Depuis 1982, personne ne l’a revu. « Ce poisson a sûrement existé pendant des centaines de milliers d’années, et maintenant il est disparu, regrette-t-il. C’est un signe effrayant de l’avenir : chacune de ses espèces est affectée par le changement climatique, pas toujours une extinction, mais certainement une extinction locale ou une extinction écologique, où ils ne peuvent plus assurer leur fonction au sein d’un écosystème. »

Cependant, il rentre de sa dernière visite aux Galápagos fin janvier, excité par sa découverte de nouvelles espèces marines, en collaboration avec Salomé Buglass, une jeune biologiste marine de la Fondation Charles Darwin qui explore les écosystèmes des monts sous-marins à l’aide d’un véhicule télécommandé.

Mais comme beaucoup de scientifiques, McCosker n’est pas très optimiste pour le futur fragile de l’archipel face au réchauffement des océans : « Si vous étiez sur le continent d’Ecuador, il suffirait de vous déplacer en direction polaire, vers le nord ou vers le sud, pour trouver un habitat plus frais, et vous pourriez le tolérer. Mais dans les îles Galápagos c’est impossible, vous pouvez aller nulle part ailleurs. Beaucoup d’espèces terrestres peuvent se déplacer vers une plus haute altitude. Mais une fois que vous avez atteint le sommet de la montagne et vous ne pouvez plus monter, vous êtes coincé. Vous n’avez plus de possibilités d’habitat… La vie sur Terre doit faire face au changement climatique. »

Un bébé otarie (Zalophus wollebaeki), laissé seul sur la plage, attend le retour de sa mère pour le nourrir, dans l’île San Cristóbal.

L’invasion des espèces

Depuis la première visite documentée de Tomás de Berlanga en 1535, suivi de trois siècles de refuge temporaire pour les chasseurs de baleine, puis le fameux séjour de Charles Darwin à bord de la Beagle en 1835 et l’escale de Herman Melville qui a inspiré Les îles enchantées en 1854, jusqu’au milieu du 20ème siècle, le paysage des îles inhabitées des Galápagos aurait, semble-t-il, peu changé.

Mais les animaux qui y habitaient vous diraient sûrement le contraire. Dès l’arrivée des premiers explorateurs dans l’archipel, les hommes ont emmené avec eux des espèces étrangères qui se sont vite emparées des lieux—chèvres, cochons et poulets d’élevage, chats et chiens domestiques, fruits et plantes, ainsi que rats, insectes et autres pathogènes—avec des conséquences catastrophiques. Le bétail dévorait la végétation sans discrimination, les chats et les chiens devenus sauvages chassaient les oiseaux et les jeunes reptiles, les rats mangeaient les œufs, les insectes les parasitaient…

A l’ombre d’un cactus, un iguane terrestre (Conolophus subcristatus) se repose sur les rochers de lave dans l’île North Seymour. En janvier 2019, 1436 iguanes terrestres ont été réintroduits dans l’île Santiago, où ils étaient disparus depuis le 19ème siècle.
Le cactus centenaire Opuntia, dont il existe 6 espèces endémiques aux Galápagos, aujourd’hui considérées vulnérables, fournit de la nourriture et de l’abri à nombre d’espèces d’oiseaux et de reptiles.

Aujourd’hui, selon la Galapagos Conservation Trust, on estime qu’il existe environ 1700 espèces introduites ou invasives à travers les îles. Parmi les plus néfastes : les chèvres (enfin éradiquées de manière agressive sur les îles de Pinta, Santiago et Isabela au bout de 10 ans en 2006), qui détruisent notamment l’habitat des tortues géantes ; la mouche parasite Philornis downsi, qui pond ses œufs dans les nids des oiseaux terrestres pour que ses larves se nourrissent du sang des oisillons jusqu’à les tuer ; les fourmis rouges ; la mûre (Rubus niveus), qui envahit les zones humides ; la quinine (Cinchona pubescens), qui éclipse la végétation indigène et transforme les habitats des hautes-terres de l’île Santa Cruz.

Une paruline jaune (Setophaga petechia) perche dans les mangroves de l’île Santiago.
Le tyran des Galápagos (Myiarchus magnirostris) est connu pour sa curiosité envers les humains.
Le moqueur des Galápagos (Mimus parvulus), une des quatre espèces de moqueurs endémiques de l’archipel, ici dans l’île Isabela.

Parmi les espèces endémiques les plus menacées : les pinsons de mangrove, premières victimes des mouches et assidûment protégés ; la moucherolle vermillon (que je n’ai vu pas du tout pendant mes six jours aux Galápagos) ; l’oiseau moqueur de l’île Floreana ; les forêts d’arbres Scalesia, d’abord décimées par la construction et l’agriculture puis achevées par les mûres ; et toujours, les tortues géantes iconiques, centenaires ou migratoires—parmi les premières espèces à débarquer sur les îles il y deux ou trois millions d’années—attaquées par les fourmis rouges, les chiens sauvages et d’autres espèces invasives, et dont les œufs ou les bébés sont également vulnérables.

Une tortue géante se promène dans une rare forêt de Scalesia-épiphytes, dans les hautes-terres humides de l’île Santa Cruz.
Une tortue géante se repose au frais dans la boue.

Déjà aux 18ème et 19ème siècles, les pirates et les chasseurs de baleine se ravitaillaient à chaque escale de dizaines de tortues géantes, bêtes « délicieuses » et plus tard sources d’huile qui pouvaient survivre des mois sans eau ni nourriture. On estime que plus de 100.000 tortues ont été enlevées des îles pendant cette période, provocant l’extinction de 4 des 16 espèces originales, dont le célèbre Georges le solitaire, dernière tortue de l’île Pinta et âgé de plus de 100 ans, décédé en juin 2012 et depuis préservé par taxidermie à la Station de Recherche Charles Darwin. La population actuelle de tortues géantes sauvages est estimée à environ 20 000, en plus de celles aux trois Centres d’élevage de tortues gérés par le Parc National Galápagos.

Des tortues géantes (Chelonoidis) issues de différentes îles sont protégées au Centre d’élevage de Puerto Ayora dans l’île Santa Cruz.
Des bébés tortues sont numérotés et suivis avant d’être réintroduits dans leur habitat naturel dans l’île Floreana.

Vecteurs plastiques

Côté mer, une équipe internationale de scientifiques a déjà repéré sept espèces invasives : deux espèces d’algue, un crabe, une étoile de mer, plus deux autres espèces qui ressemblent à des fougères ou des mousses. Le plus souvent, ces espèces ont déjà voyagé de grandes distances, attachées au dessous des coques de bateaux qui arrivent dans la Réserve Marine Galápagos.

Plus récemment, les chercheurs sont en train d’examiner les grands plastiques (mesurant plus d’un micromètre) ramassés sur les plages des îles pour essayer de comprendre comment ils pourraient servir de vecteurs pour introduire de nouvelles espèces, potentiellement invasives, dans la réserve.

Dans l’île Rábida, un pélican brun (Pelecanus occidentalis) fait sa toilette sur la plage de sable rouge.
Dans l’île North Seymour, une paire de mouettes à queue fourchue (Creagrus furcatus) font leur nid dans les pierres.

Jusqu’à présent, selon Wilson Iñiguez, assistant de recherche sur ce projet dédié aux espèces marines invasives, ils ont identifié certains invertébrés comme l’anatife (Lepas anatifera) attachés à des bouts de plastique. « Non seulement les plastiques sont toxiques pour les animaux qui les ingèrent, mais ils permettent à ces organismes attachés de voyager beaucoup plus loin qu’ils ne le feraient normalement », ajoute-t-il.

Durant tout mon séjour aux Galápagos passé à marcher sur les plages et à plonger dans la mer, j’avoue que je n’ai pas vu de déchets, mais je sais qu’ils se trouvent en abondance sur les plages moins visitées des îles les plus habitées, autour de Santa Cruz et San Cristóbal.

Un bécasseau sanderling sur la plage de Cerro Brujo dans l’île San Cristóbal.

Comme tout le monde, Wilson déplore la présence toujours croissante du plastique dans l’environnement, mais il reste optimiste quant à l’éradication des plastiques aux Galápagos, ainsi qu’aux efforts répétés du gouvernement pour essayer de limiter la pollution locale en interdisant les plastiques à usage unique, et même les feux d’artifice depuis fin 2018.

« L’idée principale, explique-t-il, c’est de prouver que ça marche. Si ça marche ici aux Galápagos, ça peut marcher ailleurs dans le monde. C’est un processus lent, mais on y travaille. En fin de compte, il s’agit juste de trouver des nouvelles façons de faire. »

Le bihoreau violacé (Nyctanassa violacea) à Punta Egas dans l’île Santiago.
Le héron des Galapagos (Butorides sundevalli) est toujours camouflé dans les rochers de lave, ici à Punta Egas dans l’île Santiago.

En parallèle, la vie marine est toujours menacée par la pêche excessive ou illégale, notamment de requins, victimes de braconnage pour leurs ailerons, ainsi que de concombres de mer (autre délice en Chine) et de homards. Les homards mangent les oursins qui mangent le corail ; sans les homards, les récifs de coraux souffrent aussi.

Il va sans dire que l’espèce la plus invasive de toutes, c’est Homo sapiens.

Tourisme terrestre et Galápageños

En 1950, les îles Galápagos comptaient 1349 habitants. Dans les années 1970, l’archipel accueillait environ 11 000 touristes chaque année, et sa population résidente a triplé. Actuellement, les îles Galápagos accueillent plus de 240 000 touristes par an, avec une population d’environ 30 000 habitants concentrés sur 3% du territoire, où presque tous travaillent de près ou de loin dans l’industrie du tourisme.

Si le gouvernement équatorien a essayé à plusieurs reprises d’imposer des limites à cet afflux d’humains, il a toujours du mal à les contrôler. Le développement des infrastructures touristiques terrestres, ainsi que la dépendance des îles avec le continent pour les matériaux, l’alimentation et autres provisions, apportent de nouveaux risques d’introduction d’espèces invasives.

A l’aéroport de Baltra, un chien cherche d’éventuelles espèces invasives dans les valises des visiteurs.

Le Parc National Galápagos a été établi en 1959, en même temps que la Fondation Charles Darwin, organisation internationale et indépendante à but non lucratif, pour fêter le centenaire de la publication du livre L’Origine des espèces. Le parc, qui couvre 7970 km2, soit 97% de la surface terrestre de l’archipel, a été déclaré un Site du patrimoine mondial de l’Unesco en 1978. Géré par le gouvernement de l’Equateur, il définit de strictes règles de conduite pour les visiteurs, qui doivent être accompagnés à tout moment par un guide naturaliste certifié par le parc, dans des groupes de 16 personnes au maximum. Aucune nourriture autorisée dans les îles, ne rien laisser, ne rien ramener, pas de flash, et surtout, ne jamais toucher aux animaux.

Le petit lézard de lave (Microlophus), dont 7 espèces différentes sont endémiques aux Galápagos, se trouve en abondance dans toutes les îles sauf celles de Genovesa, Darwin et Wolf.

C’est en 2010 que pour la première fois, le nombre de touristes à base terrestre dans les hôtels et les restaurants a dépassé celui des touristes voyageant en bateaux de croisière (94 000 et 80 000 respectivement). Depuis, le nombre de touristes terrestres ne cesse d’augmenter, avec tout le développement d’infrastructure touristique qui les suit.

Mais s’il coûte plus cher de voyager en yacht, quelques compagnies de croisières de luxe, dont Lindblad, Quasar ou Ecoventura, fonctionnent de manière durable et soutiennent activement des projets de collaboration étroite avec le Parc National Galápagos, la Fondation Charles Darwin à Puerto Ayora et d’autres initiatives de conservation et d’éducation locales.

León Durmido, ou Kicker Rock, et le bateau de croisière Islander vus de Cerro Brujo dans l’île San Cristóbal.

Et chaque voyageur écotouriste aux Galápagos, qu’il soit terrestre ou marin, au bout de sa propre expérience vécue, repart un ambassadeur éveillé de ce lieu sans pareil à l’ère Anthropocène.

Bioblitz à Santa Cruz

José Guerrero, naturaliste équatorien certifié en 2008, autant passionné par la photographie que par l’éducation, rappelle qu’aux Galápagos, tout est lié : « Si on n’a pas les animaux, il nous faudrait tous retourner au continent. Les touristes ne viendront pas pour la plage. Ici, l’attraction touristique, c’est la biodiversité. Donc le plus important, c’est d’abord de préserver cette biodiversité. Il faut s’assurer que les animaux vont bien et se reproduisent bien, donc la science est importante. Mais parfois il y a trop de barrières entre les gens qui font la science, les gens qui prennent les décisions, les gens qui travaillent dans l’éducation, les gens qui travaillent dans le tourisme, le secteur privé… chacun tire de son côté. Il faut vraiment que les biologistes travaillent avec les responsables politiques et qu’on communique entre les différentes disciplines. »

La rare buse des Galápagos (Buteo galapagoensis), prédatrice qui mangeait les poulets d’élevage avant d’être extirpée dans les zones peuplées par les humains sur trois îles, est protégée par la loi équatorienne depuis 1959.
La chouette des Galápagos (Tyto alba punctatissima), prédatrice nocturne, sur trouve dans toutes les îles sauf celle de Floreana.

La Station de Recherche Charles Darwin s’est ouverte comme le bras opérationnel de la Fondation Charles Darwin en 1964 à Puerto Ayora, lieu le plus peuplé de l’archipel. En plus de servir de base de travail pour les chercheurs scientifiques internationaux en visite aux Galápagos, elle comporte une bibliothèque, une salle d’exposition, un café, et accueille régulièrement des enfants pour des activités pédagogiques de découverte et de conservation.

Le 24 janvier 2019, à l’occasion de la visite de l’équipe de la California Academy of Sciences, dont les premières expéditions aux Galápagos datent de 1905, la Station de Recherche Charles Darwin a organisé le tout premier Bioblitz des Galápagos, dans l’île Santa Cruz. Pendant deux heures, équipés de l’application mobile iNaturalist sur leurs smartphones, 16 enfants et adolescents curieux et enthousiastes ont photographié au moins 79 espèces différentes (pinsons, pélican, mousse, escargot, coccinelle, cactus, araignées, champignons, fleurs, cricket, guêpes, tortue, raie, iguane, poisson, bivalves…). Pour certains, c’était leur première visite aux Galápagos ; pour d’autres, c’était l’occasion de redécouvrir leur île d’un autre regard.

Un couple de crickets endémiques (Schistocerca melanocera) dans l’île Santiago.

Pour nous tous, l’ouverture d’esprit et l’engagement des enfants, c’est de l’espoir. Car les îles Galápagos représentent peut-être notre dernière opportunité d’apprendre, d’apprécier et d’agir, à la fois localement et à l’échelle de la coopération internationale, afin de collectivement reprendre en main la vie sur Terre.

Comme l’écrivait Jonathan Franzen : « Seulement une appréciation de la nature en tant que collection d’habitats menacés spécifiques, plutôt qu’une chose abstraite qui est en train de “mourir”, peut éviter de dénaturer complètement le monde. »

Pour commencer, prière de ne pas marcher sur les iguanes.

Le site du Parc National Galápagos

Télécharger l’Atlas de Galápagos : Especies Nativas e Invasadores (en espagnol), 2018, édité par la Fondation Charles Darwin