Vol de montgolfière aérosolaire à Fontainebleau avec Tomás Saraceno
Publié le 6 novembre 2018 par Ewen Chardronnet
Le 26 octobre se tenait un séminaire de la Fondation Aerocene dans le cadre de l’exposition Tomás Saraceno au Palais de Tokyo. Avec la promesse d’un vol humain en ballon solaire pour le lendemain. Challenge tenu au petit matin près de Fontainebleau. Photoreportage.
Fontainebleau, envoyé spécial
Aerocene est une fondation initiée par l’artiste argentin Tomás Saraceno qui imagine un changement d’époque qui considérerait enfin la protection de notre atmosphère comme une priorité fondamentale. Le séminaire « On Air live with… Aerocene » coordonné par la géographe Sasha Engelmann rassemblait ainsi des activistes, contributeurs et membres de la Fondation Aerocene aux expertises multiples en justice environnementale, capteurs open source et culture distribuée, philosophie, histoires et problématiques de l’air.
Une grande part des propositions de l’exposition présentée au Palais de Tokyo à Paris consiste en l’imagination de nouveaux types de transports et habitats aériens utopiques. Aerocene démocratise ainsi la propulsion en montgolfière aérosolaire, un principe thermodynamique testé par quelques pionniers à partir des années 1970 et que Tomás Saraceno a exploré dans ses créations depuis une quinzaine d’années et qu’il s’est décidé à promouvoir dans le cadre d’une fondation à but non lucratif au regard des urgences climatiques contemporaines.
Les ballons aérosolaires de la Fondation Aerocene sont basés uniquement sur la chaleur des rayons du soleil captée par leurs toiles noires. Ils décollent sans brûler d’énergies fossiles, sans utiliser de panneaux solaires et batteries, sans hélium, hydrogène ou autres gaz rares. Seule la différence de température entre l’intérieur et l’extérieur mène à l’élévation. Véritables sculptures flottantes à la beauté indéniable, les ballons solaires sont également des chevaux de Troie dans l’espace aérien pour manifester l’impérieuse nécessité d’une loi transnationale qui viendrait contester le monopole de la loi de l’aviation et mettrait en avant la priorité de la protection de l’atmosphère et la liberté de mobilité écologique face à l’accroissement incessant des transports carbonés qui tapissent nos cieux de suie.
Première montgolfière aérosolaire enregistrée au monde
Longtemps les ballons solaires sont restés à l’état de prototypes que personne ne voulait enregistrer et assurer comme ballons de loisir. Le tour de force de Tomás Saraceno et de la Fondation Aerocene a été d’enregistrer officiellement la première montgolfière aérosolaire en 2015 sous l’immatriculation D-OAEC. Après un premier vol dans le désert de White Sands en 2015 au moment de la COP21 (dont Makery vous avait parlé en détails) la montgolfière noire faisait donc son premier vol en France ce 27 octobre dans la région de Fontainebleau. « 235 ans après le premier vol humain des frères Montgolfier », comme le rappelait Tomás Saraceno après l’expérience. Retour en images.
A 7h30 les premiers membres de l’équipe arrivent dans la brume sur la pelouse de l’aérodrome de Moret-Episy au sud de la forêt de Fontainebleau. L’équipe Aerocene est chanceuse, une fenêtre météo sans vent et ensoleillée s’est ouverte pour quelques heures. Le pilote, Igor Miklousic du Balon Klub Zagreb en Croatie, repère le terrain et décide des points d’ancrage du vol captif de la grande montgolfière aérosolaire D-OAEC.
8h, le jour se lève doucement. On gonfle les premiers Aerocene Explorers, ces ballons tétraédriques noirs de 3 à 4m d’envergure. Un surveillant de l’aérodrome passe saluer l’équipe. L’autorisation de vol a été rendue possible par l’intermédiaire de l’association France Montgolfières, de l’Aéro-club de la Vallée du Loing et du pilote certifié.
Les autres membres de la communauté Aerocene convergent petit à petit et découvrent trois Explorers tels des ovnis sur la pelouse de l’aérodrome. Un rendez-vous attendu et mis en place grâce aux efforts coordonnés des communautés française et internationale de la Fondation Aerocene, du Palais de Tokyo et du Studio Tomás Saraceno.
Tandis que le soleil commence à percer dans la brume, les équipes s’activent à déployer des surfaces réfléchissantes au sol afin de concentrer la lumière et les radiations infrarouges.
La montgolfière D-OAEC est déployée au centre des surfaces réfléchissantes et est gonflée progressivement.
Le pilote vérifie les cordages du parachute (ou valve) permettant de laisser échapper de l’air chaud et de dégonfler la montgolfière en fin de vol.
La montgolfière commence à prendre forme dans le brouillard qui donne un aspect éthéré à la scène.
Le brouillard se dissipe et le soleil reprend ses droits, les Explorers commencent à se soulever. Tomás Saraceno partage son enthousiasme avec la communauté présente.
Il est 9h passé et le brouillard a totalement disparu. Les tétraèdres noirs décollent, la montgolfière commence à se dresser.
La D-OAEC a pris sa posture verticale. Elle commence à se décoller du sol.
Il est temps d’harnacher Sasha Engelmann, la première candidate pour le vol humain porté par la D-OAEC. Les conditions optimales se prolongent en ce milieu de matinée.
Le tétraèdre Aerocene Explorer prend de l’altitude. L’espace aérien reste cependant restreint, de petits avions décollent et atterrissent à proximité.
Changement de pilote. Cette fois c’est Cédric Carles du Solar Sound System qui enfile le harnais.
Malgré le ciel légèrement voilé les quatre ballons flottent joyeusement dans l’air. Toujours captive, la montgolfière noire porte l’anthropologue argentine Débora Swistun qui participait la veille au séminaire.
Il est midi et le vent commence à monter. Igor Miklousic réalise une courte tentative de vol libre. Le ballon prend la direction de la piste de décollage des avions.
Tel un ballon cerf-volant, un Explorer guide tranquillement sa pilote vers le hangar des planeurs au loin. Il est temps de terminer l’expérience.
En savoir plus sur le vol du 27 octobre sur le site de la Fondation Aerocene.
Retrouvez On Air, carte blanche à Tomás Saraceno au Palais de Tokyo jusqu’au 6 janvier 2019.