Point d’orgue de la Fashion Tech Week, la Fashion Tech Expo présentait sa sélection à la Cité de la mode et du design le 19 octobre. Passage en revue.
Pour ses organisatrices, c’est une première. Après Numa et La Paillasse, la 5ème édition de la Fashion Tech Expo a installé ses portants au cœur de la Cité de la mode et du design à Paris pour conclure la Fashion Tech Week, la version geek et tech de la semaine de la mode du 12 au 20 octobre.
« La Cité cherchait à avoir un contenu un peu alternatif. On nous a proposé cette opportunité que nous sommes ravies d’accepter, car exposer ici apporte de la visibilité et de la reconnaissance. Mais la Fashion Tech Expo restera un événement nomade », explique Alice Gras, fondatrice de Hall Couture, un espace de coworking pour les makers de la mode. Avec sa petite équipe de bénévoles, elle s’active une bonne partie de l’année sur la programmation de la Fashion Tech Week et sa cohorte de conférences, pitches de start-ups et hackathons dans plusieurs lieux parisiens.
Moins de bidouilles, plus de couture
Plutôt exigu, l’espace mis à disposition par la Cité de la mode pour que la Fashion Tech y installe son showroom éphémère le 19 octobre présentait dix-huit projets sélectionnés par les organisatrices (sur une trentaine de candidatures reçues). « Nous avons quatre critères de sélection, explique Alice Gras : la qualité de la réalisation des protos ou des maquettes, la qualité de la team qui porte le projet, l’audace et la singularité de la création, et enfin la cohérence entre l’identité visuelle et le concept théorique initial. »
« Cette année, les questions d’économie circulaire sont de plus en plus prises en compte dans les projets, contrairement aux précédentes éditions où les propositions étaient un peu plus prospectives, un peu plus tech », ajoute Claire Eliot, enseignante-chercheuse au Centre de recherches interdisciplinaires (CRI) et copilote d’Alice Gras pendant la Fashion Tech Week. Au final, trois tendances principales se dessinaient parmi les projets retenus. Si l’innovation technologique constitue toujours le cœur de la Fashion Tech Expo, les préoccupations écocitoyennes et les mutations des processus de production y prenaient en effet une place inédite.
Vestiaire à la demande
Pour son cru 2017, la Fashion Tech Expo misait également sur des projets plus ou moins conceptuels portés par des étudiants ou de jeunes chercheurs, comme la collection Fashion Tech Away d’Elisabeth Jayot, doctorante en Théories et pratiques de la mode à la Sorbonne et à l’Institut français de la mode.
Pour les huit pièces de sa collection, cette designeuse spécialisée dans la confection sans coutures s’est inspirée du principe des pièces détachées pour assembler des vêtements modulaires et personnalisables fabriqués avec des machines à commande numérique. « Mon but est d’imaginer quelles transformations ces nouveaux outils vont apporter à notre système de mode, en produisant localement et à la demande », explique cette familière des fablabs parisiens Woma et Villette Makerz. Avec son système de production sur commande, nul besoin de stocker les pièces, ce qui limite les coûts liés aux invendus, au transport et à la distribution.
Découpé à la laser, un seul patronage est utilisé pour toute la collection. Un système d’attaches malin permet d’ajouter des bandes pour varier les longueurs. En quelques minutes, un chemisier se transforme en robe ou une veste en manteau. « Ce principe d’imbrication est inspiré par les packagings sans colle et les charpentes sans clous ni vis, précise-t-elle. Les lanières rentrent dans des encoches, comme elles sont plus larges d’un côté, elles se bloquent automatiquement. » Pour personnaliser son vêtement, le client ajoute les pièces qu’il veut : poches, bavolets pour un style trench coat ou systèmes de fermeture, toujours sans coutures et en un temps record.
« J’ai monté la collection en deux jours seulement, un pour la découpe en fablab, l’autre pour l’assemblage dans mon atelier. Mais le patronage et la modélisation demandent beaucoup de travail en amont, confie-t-elle. Mon objectif est de déplacer l’investissement en temps et en difficulté dans la conception pour qu’ensuite, la fabrication soit simple, rapide et efficace. »
Beaucoup plus sinueux niveau démarche conceptuelle, le projet de Justine Vivier cartographie le vêtement sur le corps, comme on le ferait avec un plan d’urbanisme. « Comme on construit une ville, je propose de construire le vêtement directement sur le corps », dit cette étudiante à l’Ecole de Condé qui se définit volontiers comme designeuse-architecte du vêtement.
L’impression 3D, star des défilés
Sur les podiums, l’impression 3D a encore de beaux jours devant elle. Lunettes, bijoux, chaussures… Un bon tiers des exposants de la Fashion Tech Expo faisait démonstration de cette technique, utilisée indifféremment pour les vêtements ou leurs accessoires.
Avec sa collection de prêt-à-porter haut de gamme, Marisa Garnier mixe procédés traditionnels et innovations technologiques pour la réalisation de ses protos. « Pour ma collection capsule qui sortira cet hiver, je me suis inspirée des fractales, de l’art cinétique et des formes mathématiques en utilisant l’impression 3D, la découpe laser et le dévorant textile », expose la créatrice devant un attroupement de fashionistas et de blogueuses mode.
Seule difficulté pour développer son projet : trouver des imprimantes 3D adaptées au filament flexible, plus agréable à porter, et qui soient suffisamment grandes pour fabriquer des patrons. « L’objectif à terme est de monter notre atelier et de fabriquer une imprimante 3D à fil souple sur mesure pour augmenter les zones d’impression, précise-t-elle. Celles des fablabs sont trop petites. En attendant, on découpe et on assemble. »
Le site de la Fashion Tech Expo