David Rochelet, passé par l’Electrolab de Nanterre, a fondé au Cameroun le Doualab. Il est aussi de l’aventure de l’Ongola Fablab, le premier de la capitale Yaoundé. Il nous en raconte l’ouverture, le 6 avril.
Yaoundé, correspondance
Comment apporter à l’Afrique, ses vastes espaces et son écosystème entrepreneurial naissant toute la dynamique créée par des espaces de travail en commun et le partage des connaissances ? Le 6 avril a été inauguré l’Ongola Fablab, le premier à Yaoundé, capitale du Cameroun, fruit d’un partenariat entre l’Agence universitaire de la francophonie (AUF) et la fondation Orange. Une centaine de personnes s’y sont pressées, dont des membres du gouvernement camerounais, les recteurs et autres représentants d’universités publiques et privées, des membres de la fondation Orange et de Orange Cameroun, des médias, et bien évidemment les jeunes qui sont au cœur du projet.
Il y a au Cameroun tout un écosystème lié à l’éducation (universités, centres de recherche, grandes écoles) qui a besoin d’outils non seulement technologiques mais aussi d’espaces de partage pour mener à bien des projets. Le niveau d’équipement n’est pas le même qu’en Europe : beaucoup d’étudiants arrivent en fin de diplôme avec une expérience pratique très faible, voire inexistante, ne garantissant pas une entrée réussie dans la vie active. Fort de ces constats, ces acteurs avaient en tête de développer une plateforme commune. C’est tout naturellement que l’appel à projet Fablabs solidaires de la fondation Orange a attiré leur attention.
En effet, la fondation Orange a mis en place un programme d’éducation au numérique destiné à favoriser l’insertion des jeunes (Makery vous en parlait) à travers un réseau de 51 fablabs permettant à tous, et en particulier aux populations défavorisées, d’accéder à ce formidable outil dans le but de pouvoir eux aussi construire leur avenir.
Après quelques mois de réflexion sur le matériel à réunir, les budgets et l’aménagement des locaux, une première pré-étude a été réalisée par un partenaire européen ayant une grande expérience du milieu des makerspaces et a permis la rédaction de dossiers pédagogiques. L’accompagnement a été confié à une équipe camerounaise pour garantir la bonne adaptation au contexte local, notamment pour ce qui concerne la compatibilité avec les contraintes logistiques et électriques locales.
Une deuxième pré-étude réalisée en local par l’équipe a permis de fixer les principaux domaines à intégrer dans le fablab : création 2D et 3D, électronique et Internet des objets (IoT), mais aussi usinage et découpe laser, travail du bois et couture ont chacun eu leur zone dédiée dans les nouveaux locaux.
Quelques modélisations 3D plus tard, tout le monde était d’accord et la recherche de fournisseurs a pu commencer.
Paris, Douala, Yaoundé
Beaucoup de difficultés se posent lorsque l’on veut travailler sur un fablab au Cameroun. Il est surtout nécessaire de créer tout un écosystème d’utilisateurs, fournisseurs, partenaires et entreprises qui vont apporter leur contribution au fablab ou bien en utiliser les services.
Dans un premier temps, travailler avec plusieurs partenaires de mondes différents sur un tel projet demande beaucoup d’ajustements, notamment dûs au fait que les personnes étaient situées à Paris, Douala et Yaoundé.
Puis viennent toutes les étapes de sélection fine du matériel, de sélection des fournisseurs en fonction de la facilité d’approvisionnement, de l’adaptabilité au contexte local, de jalons projets à tenir, sans oublier bien sûr les objectifs du projet : permettre aux populations défavorisées d’accéder à ces technologies et favoriser les technologies ouvertes compatibles avec la charte des fablabs du MIT et la volonté de rendre tout un chacun acteur dans la construction du lieu.
La course avant l’ouverture
Jusqu’à début avril, ce fut la course au matériel, à l’aménagement (avec des travaux dans le local pas toujours évidents à gérer), et la préparation d’un programme de formation adapté aux gestionnaires et bénéficiaires du lieu en fonction du calendrier de livraison. Bien sûr, comme sur tous les projets, tout est arrivé en même temps début avril et la formation, la réception du matériel, l’inauguration et la réception finale des travaux ont dû être réalisées sur quelques semaines.
La veille de l’inauguration, les premiers bénéficiaires de l’association Asseja ont pu venir participer à un atelier impression 3D, broderie numérique, découpe vinyle et électronique. Un grand moment de découverte non seulement du matériel du fablab, mais aussi de belles perspectives de collaboration à venir.
L’avenir du projet s’appuie aussi sur un réseau de partenaires qui permette d’accompagner les jeunes et les porteurs de projets vers l’écosystème de l’entrepreneuriat et des nouvelles méthodes de travail. Mais le fablab de Yaoundé doit aussi donner des idées à de nombreuses personnes au Cameroun, et plus largement en Afrique centrale et dans la région des Grands Lacs en montrant que oui, il est possible d’avoir des lieux de travail en commun permettant à tous d’innover, d’entreprendre et de trouver des solutions aux problèmes locaux.
L’ouverture au public d’Ongola Fablab est effective depuis la mi-avril, via les journées OpenLab. Beaucoup de visiteurs sont d’ores et déjà venus nous rencontrer et poser des questions sur le projet, manifestant leur vif intérêt pour ce lieu. Alors vous aussi, si vous êtes sur Yaoundé, passez nous voir 😉
En savoir plus sur l’Ongola Fablab, AUF de Yaoundé, Cameroun
Retrouvez la précédente chronique de David Rochelet pour Makery