Certains prennent la tangente en été. Pas Caroline Grellier, qui a sorti son tout premier proto pour Termatière, projet de création de matériaux recyclant les déchets agricoles. Un panneau composite de sarments de vigne, conçu en labo, a été découpé dans un fablab.
Pendant que certains se doraient la pilule sur la plage en août, j’ai passé mes journées dans la chaleur moi aussi, une chaleur étouffante et humide, un climat tropical… mais dans la halle du laboratoire en matériaux de l’école des Mines d’Alès, le C2MA. Même si les presque trois heures de conduite quotidiennes à travers les routes sinueuses des Cévennes m’ont octroyé un semblant de vacances…
Objectif de juillet : produire, produire, produire pour prototyper, prototyper, prototyper. Sur le papier, le plan était simple : adopter un format plus grand de thermo-presse pour produire des panneaux destinés aux premiers prototypes de coffrets de vin. Mais rien ne se passe décidément comme prévu : la règle de trois qui permet de multiplier les proportions n’a pas fonctionné. C’est donc une sorte de galette de sarments toute séchée et effritée que j’ai sortie de la presse. Pour obtenir un panneau exploitable, j’ai dû revoir encore les ratios.
Sur les conseils des chercheurs et doctorants du C2MA, j’ai cherché la fourchette haute de la recette. Ça n’a pas loupé : la résine a débordé de la presse. Résultat : grattage, nettoyage et astiquage du moule et des plateaux chauffants pendant une bonne heure. Entre la fourchette haute (super-maxi-résinée) et la fourchette basse (super-pas-résinée), j’ai passé le reste de la journée à réaliser des panneaux en augmentant d’1% le ratio de résine à chaque essai. Et j’ai finalement trouvé la recette satisfaisante pour produire une mini série de 7 panneaux de 40 X 40 cm.
A la Fruitière numérique
Pour la réalisation des premières maquettes, et histoire de me concentrer sur ce seul objectif, j’ai pris la route pour Lourmarin, charmant village de Provence abritant un fablab où il fait clairement bon vivre et travailler, la Fruitière numérique.
Trois jours de résidence là-bas m’ont permis d’effectuer quelques tests de finition sur mon matériau, et de retrouver posément ma casquette de designer. Ça faisait bien longtemps que je n’avais pas gribouillé quelques esquisses de coffrets et de vins. Il faut bien avouer que l’ambiance détendue et bienveillante qui règne à la Fruitière numérique aide à prendre du recul. Croiser les avis de bricoleurs et de passionnés m’a aussi fait replonger dans cet univers de la débrouille qui me plaît tant et qui déteint depuis le début sur le mode opératoire de Termatière.
C’est en exposant à Georges Bonicci, fabmanager et bricoleur invétéré, mon souci de trouver de petits fabricants de panneaux en sous-traitance prêts à réaliser de petits volumes, ou bien d’investir au minimum dans des machines si la production devait être internalisée, qu’a émergé l’idée que Termatière fabrique ses propres machines, en se basant sur des plans open source. L’idée me séduit : je retrouve ici les valeurs que je défends à travers le projet. Affaire à suivre donc !
Après une rapide maquette en carton, Georges m’a aidé dans la réalisation d’un premier coffret.
L’esthétique du panneau poncé est intéressante, mais la fraction de sarments est sûrement trop petite et les épaisseurs de panneaux trop minces pour permettre certains types d’assemblage. Reste à savoir ce qu’en penseront les clients potentiels…
L’étude de marché flash se terminera fin septembre. L’heure du bilan approche, car une fois toutes les cartes en main, il sera temps de prendre des décisions stratégiques…
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