MakerTour (4): chacun ouvre son lab
Publié le 9 janvier 2016 par Etienne Moreau
7000km parcourus, 20 ateliers explorés… Cela fait presque trois mois que Mathieu Geiler et Etienne Moreau parcourent le pays de lab en lab, dans le cadre du MakerTour, qu’ils chroniquent pour Makery. De quoi s’interroger sur les raisons de l’engouement pour les fablabs, particulièrement fort en France.
Fablab. Un réseau mondial d’ateliers collaboratifs de fabrication (mais pas que) ouvert à tous. L’idée intrigue, fait couler de l’encre et déchaîne les passions dans le monde. Ces ateliers en réseau d’un nouveau genre trouvent un écho particulier en France. Le sujet est présent sur toutes les lèvres, des passionné(e)s de la première heure aux plus grandes entreprises du pays.
Chacun revisite le concept à sa manière et ouvre son « lab », traduisant un actuel effet de mode. Durant les explorations de MakerTour, plusieurs questions sont apparues : pourquoi ouvre-t-on un fablab aujourd’hui ? Quelles sont les motivations des personnes derrière ces initiatives ? Et qu’est-ce qui a changé depuis les débuts du mouvement ?
Une des pièces du puzzle
Depuis l’ouverture d’Artilect à Toulouse en 2009, suivre la multiplication et l’évolution de ces lieux est une gymnastique quotidienne. D’autant plus que les fablabs s’inscrivent dans un paysage historique d’ateliers maillé de hackerspaces, de makerspaces, d’usines collaboratives, de biohacklabs, d’espaces publics numériques et autres laboratoires ouverts. Avec l’hypermédiatisation des fablabs, le sujet s’est immiscé dans des milieux bien au-delà des bastions originels de la culture maker et de la culture libre. Le concept est réellement devenu ouvert à tous… pour le meilleur et pour le pire.
D’un placard à balais à Toulouse…
Artilect a ouvert la voie en France. A l’origine du projet, deux amis découvrent le projet Fab@Home lors d’une visite à l’université de Cornell aux Etats-Unis, en 2007. De là naît l’envie commune de créer un lieu pour fédérer des projets à l’aide d’outils à commande numérique.
Artilect (pour Artificial Intellect) sera un lieu hybride qui croise l’aspect recherche (comme à Cornell), académique (comme au Fablab IAAC de Barcelone), professionnel (comme à Philadelphie), et grand public (comme au Fablab Amsterdam de la Waag Society). Ils récupèrent alors un « placard à balais » de 12 m2 à l’ancienne Manufacture des tabacs de Toulouse. L’association se finance par de petits projets et grandit à son rythme grâce à ses membres.
Sept années plus tard ? Artilect a déménagé et occupe désormais 550 m2. L’association fédère une communauté d’un millier d’adhérents, réunit quarante fablabs lors de la réunion annuelle du mouvement, a ouvert son « FabCafé » et développe des activités à destination des professionnels avec Artilect Lab. L’époque du « placard à balais » est loin.
… à l’impact des communautés locales d’Albi et Perpignan
Depuis les débuts d’Artilect, une centaine de lieux sont sortis de terre en France. Parmi les nouveaux ateliers français, le Fablab Albi (Tarn) et le Squaregolab de Perpignan (Pyrénées Orientales) ont ouvert il y a quelques mois.
Le Fablab Albi s’est donné pour mission de « faire le lien entre cohésion sociale, numérique et environnement, dans un objectif pédagogique ». Le Squaregolab est un « tiers-lieu collaboratif accélérateur d’innovations », ouvert à tous ceux qui veulent entreprendre, bricoler, et apprendre par eux-mêmes.
Les motivations sont plus diversifiées aujourd’hui, des ateliers s’emparent de multiples sujets : fabrication personnelle, numérique, cohésion sociale, environnement, entrepreneuriat, innovation, etc. Mais qu’est-ce qui rapproche deux jeunes ateliers comme le Fablab Albi et le Squaregolab ? La communauté locale s’est impliquée très tôt dans le projet, par le financement participatif (campagne de crowdfunding à Albi, modèle de SCIC et de coopérateurs à Perpignan), et par l’aide au montage et à l’aménagement du lieu.
Expérimentations en cours
Trouver des lieux adaptés, toucher plusieurs centaines de personnes, mobiliser la participation (financière et autre) des particuliers et acteurs locaux, développer des projets avec des équipes et communautés partout dans le monde : autant de choses rendues possibles par la démocratisation globale des fablabs et le travail réalisé par les pionniers, en France et ailleurs.
Aujourd’hui, il est possible de voir plus grand plus vite. Jusqu’où iront ces ateliers ? Si nul ne possède la réponse, observer leurs premiers pas avec attention est un bon moyen d’apporter une réponse.
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