La toute première Fablearn Asie a eu lieu les 12 et 13 décembre à Yokohama. Elle s’inspire de l’originelle Fablearn, conférence organisée depuis 2011 par l’université de Stanford en Californie pour évoquer l’avenir de l’enseignement de la fabrication numérique.
Yokohama, envoyée spéciale
C’est sous l’auspice du yin et du yang que Fablearn Asie 2015, organisée par le Social Fabrication Lab de l’université de Keio et animée par la directrice du Fablab Kamakura, Youka Watanabe, s’est ouverte au Yokohama Port Commemoration Center, un immeuble historique en briques rouges et blanches qui date de 1917, le 12 décembre. Cette conférence sur l’avenir de la pédagogie et de l’enseignement de la fabrication numérique occupait ce lieu commémoratif avec toute la grâce d’une soirée mondaine, infusée de l’esprit de découverte d’une colonie de vacances.
Dans l’amphithéâtre principal régnait dès samedi matin une ambiance résolument académique. On ne parlait pas seulement de l’enseignement Stem (sciences, technologie, ingénierie, mathématiques), mais de l’intégration holistique de l’apprentissage par le faire et de la réappropriation des outils.
Paulo Blikstein, chercheur à l’université de Stanford et créateur du projet FabLab@School, a détaillé ses efforts pour rattraper la « division pédagogique » qu’il a constatée au Brésil, au Mexique et en Thaïlande. Selon lui, « l’élève moyen n’est pas un hacker » : il faut l’encadrer, lui faire découvrir et lui donner les moyens de se développer à l’école.
Yuta Komori a raconté comment depuis 2011, son projet Life is Tech utilise la programmation informatique comme moyen d’apprendre tout le reste, dans des collèges et lycées à travers le Japon. Le projet compte aujourd’hui quelque 13 000 élèves, dont 40 % de filles et 80 % de débutants, qui évoluent du point de découverte (« switch point ») au point de décollage (« jump point ») jusqu’au point d’autonomie (« self-propelled »). Slogan : « Et si tu changeais le monde ? ». Reste à chacun de définir son monde.
Le designer et directeur artistique Managu Tago a évoqué une étude qui montre le pourcentage de personnes n’ayant aucune envie de créer leur entreprise : 23 % aux Etats-Unis, 40 % en France et 77 % au Japon. Seules 5 % des entreprises japonaises sont d’ailleurs des start-ups. D’où l’initiative Enhancing Development of Global Entrepreneurs (Edge).
L’après-midi était réservée aux workshops, qui privilégiaient la découverte, l’accessibilité et l’autonomie vis à vis des outils et la fabrication digitale : Fabbot et Fab Walker (pour fabriquer son robot à partir de zéro) ; créer son propre circuit (via CNC) ou son récit LED (via Arduino) ; s’initier à la modélisation 3D (via Fusion 360 d’Autodesk) ou au design 2D (pour découpe laser) ; dessiner son circuit au stylo (AgIC) ; découvrir Scratch et Makey Makey ; comprendre le prototypage élémentaire avec le kit Mesh (on y reviendra) ; partager son projet en open source avec Fabble. S’il y avait peu d’enfants dans la salle, les adultes (la plupart enseignants) étaient tout aussi enthousiastes pour l’approche pratique et collaborative.
Le fondateur du Social Fabrication Lab de l’université de Keio, Hiroya Tanaka, a insisté à la fin de la journée sur l’ouverture et l’imbrication des espaces et des concepts, soit le yin et le yang de l’apprentissage dans la vie pratique : Internet et réalité, efficacité et création, hi-tech et low-tech, capitalisme et économie du partage…
Mais les outils ne sont que des outils, a-t-il rappelé : si la fab 1.0 consiste à fabriquer quelque chose d’original en utilisant des machines existantes, la fab 2.0 consiste à fabriquer quelque chose en utilisant des machines originales. Il cite en exemple ces imprimantes 3D qui produisent des objets architecturaux, médicaux, comestibles… Et comme en écho, à la Fab dinner party, on servait du riz moulé en forme du Mont Fuji !
Suivez le prochain FabLearn Europe en Grande-Bretagne les 19 et 20 juin 2016