Bricole it Yourself: les particules fines filtrées par des tutos?
Publié le 14 avril 2015 par Quentin Chevrier
Dès le début du printemps, Paris et plusieurs grandes villes européennes fières de leurs réseaux de vélos partagés étaient sous le coup d’alertes à la pollution. A défaut de pouvoir retenir sa respiration, peut-on se bricoler une protection efficace?
C’est quoi la pollution ?
Du dioxyde de carbone, des particules plus ou moins fines, de l’ozone, de l’oxyde d’azote… s’il n’y a que l’embarras du choix, les récentes alertes parisiennes, mais aussi grenobloises par exemple, concernaient principalement les particules fines (d’une taille de 2,5µm, et en-dessous, soit 1/30e d’un cheveu humain environ) et obligent à limiter l’usage du moyen de transport le moins polluant… le vélo. Un comble.
Des détecteurs faits-maison
Certaines grandes agglomérations possèdent un ou plusieurs réseaux de mesure (Plumelabs ou Air Parif, récemment critiqué par la ministre de l’Ecologie, pour l’Ile-de-France), le maillage de ces réseaux est très lâche, alors que les taux de concentration des polluants peuvent varier d’une rue à l’autre, d’un arrondissement à l’autre. Alors, comment connaître la pollution de son environnement direct ?
La recherche en ligne de capteurs de pollution de l’air pour maker concerné est plutôt décevante. Les capteurs les plus abordables se concentre sur les gazs : ozone, dioxyde et monoxyde de carbone, méthane, butane, vapeurs d’alcool… avec des résultats peu précis, surtout pour mesurer des quantités relativement faibles. Un capteur de CO2 correct coûte au minimum une centaine d’euros à lui seul. S’il existe un capteur de pollution aux particules fines à 15 dollars les testeurs avertis ont jugé ses mesures longues, peu fiables, et très « bruitées ».
L’agence américaine de protection de l’environnement organise des ateliers pour construire son capteur DiY de particules
A Doha, au Qatar, DohaDust.org est basé sur ce capteur. Si la mesure n’est pas d’une précision scientifique, l’initiative d’Alex Johnson, expatrié américain au Qatar, a le mérite de donner l’exemple : puisque la ville ne mesure pas la pollution, Alex l’a fait, rend l’information publique et partage le montage de son appareil de mesure.
Le tutoriel d’Alex Johnson pour construire sa station de mesure connectée
Un jeune maker améliore les capteurs de particules fines
Lui aussi lassé de ne pouvoir compter que sur 4 stations de mesure régulièrement en panne pour toute la ville de Bangalore, le jeune créateur du site India Air Quality a conçu son premier capteur de pollution à 10 ans. L’occasion de se mettre à l’Arduino, et de vite comprendre les limites de son premier prototype.
A force de recherche, de prototypes, ainsi que de rencontres avec les ingénieurs du fournisseur de stations de mesure de Californie, où il a emménagé, le jeune maker finit par améliorer tout seul les capteurs grand public de Los Altos. En remplaçant certains composants et en repensant la circulation de l’air dans le capteur, il améliore drastiquement la fiabilité des capteurs, et commence à réfléchir à un système distribué de stations de mesure DiY. En attendant, son compte Twitter publie automatiquement chaque heure la concentration en particule fine sur le rebord de sa fenêtre.
Le danger détecté, comment se protéger ?
Evitons tout suspens : il n’y a aucune recette de grand-mère valable pour se protéger des particules fines à vélo, à pied ou à cheval. Les masques en tissu, les foulards sur le nez, les linges mouillés… ne bloquent rien de plus que vos défenses naturelles (c’est à dire la pilosité nasale). C’est mieux que rien, mais c’est rien face aux particules fines.
Si les makers aiment se saisir d’enjeux de société (agriculture, santé, handicap…), les solutions DiY de masque anti-pollution sont pour le moment introuvables. Sauf à considérer que la bouteille de plongée est une solution (trouvée sur un forum de santé)… L’idée de faire du vélo avec plusieurs dizaines de kilos sur le dos, après avoir compressé de l’air pur dans les bouteilles, n’apparaît pas des plus pertinentes…
Même sans passer par le DiY, les masques de protection pour cyclistes ne sont pas non plus la panacée. Le masque le plus répandu dans le commerce, le modèle sport de la marque britannique Respro, ne filtre pas toutes les particules. D’après les usagers, il est en plus particulièrement inconfortable. Le masque fait mal, isole l’utilisateur dans son haleine de fin de journée, le submerge de sa propre condensation… Apparemment, respirer 60 litres d’air à la minute (volume respiré en moyenne pendant un effort physique) à travers un filtre à charbon actif et un filtre électrostatique est suffoquant. C’est pourtant la solution de filtrage la plus aboutie à l’heure actuelle.
L’impression 3D à la rescousse ?
Dernier problème, ces masques de protection se vendent en trois tailles (small, medium et large). Fatalement, les masques n’épousent pas parfaitement les formes du visage. Des fuites d’air se créent. Pendant l’effort, l’utilisateur respire à plein poumons, force le passage de l’air, et particules fines et moins fines passent par ces aspérités.
Deux américains, Josh Reed, designer industriel, et Leandro Rolon, architecte, explorent la piste de l’impression 3D pour résoudre le problème. Comme pour des semelles orthopédiques, l’idée est de scanner et modéliser le visage de chaque utilisateur pour ensuite imprimer un masque en plastique souple, au volume et à la forme optimisés.
On aurait aimé vous donner plus de soluces et de pistes pour vivre avec les pics de pollution. Sauf si l’une de ces soluces nous avait échappé, il semble bel et bien que le mouvement maker ait là un défi à sa taille. Saurez-vous le relever ?