«Oui, c’est un lobby»: pourquoi les labs industriels s’unissent
Publié le 31 mars 2015 par Quentin Chevrier
Qu’ils s’appellent fablab, garage ou laboratoire collaboratif, les labs d’entreprise veulent de la visibilité. 14 d’entre eux, dont Areva, Renault, Alcatel-Lucent, Safran, Dassault et Bouygues viennent de créer l’association Fab&co. Un lobby, et bien plus encore, revendiquent pour Makery les fabmanagers de Renault et d’Alcatel.
L’avis de naissance de l’association est paru la semaine dernière dans Industrie & Technologies. Fab&co réunit pour l’instant 14 labs d’entreprise, ceux d’Alcatel-Lucent, Renault, Areva, Airbus, Dassault Systèmes, Bouygues, Air Liquide, Seb, Leroy Merlin, Systra, Snecma et Poult, accompagnés de ICI Montreuil et l’Usine IO. 14 entreprises, dont 7 cotées au CAC40, soit 14 fabmanagers pour monter une association ayant pour objet de « fédérer les labs qui aident à l’innovation professionnelle », affirme Bertrand Marquet, fabmanager du Garage d’Alcatel-Lucent. FAb&Co permettra, précise Mickaël Desmoulins, du Creative Lab de Renault et futur président de Fab&co, « d’aider et accélérer l’ouverture de ce type de lab en entreprise, ou plus généralement des labs pro-business, tournés vers la création de valeur ».
Ci-dessous, de gauche à droite, Pierre Turkiewicz du Garage Alcatel-Lucent, Mickaël Desmoulins du Creative Lab Renault, et Bertrand Marquet du Garage Alcatel-Lucent :
« Oui, c’est un lobby »
Mickaël Desmoulins ne s’en cache pas. L’asso compte bien devenir « le lobby des labs pros », une voix qui compte, que ce soit pour s’adresser aux politiques, répondre à des appels à projets, prendre part à l’initiative French Tech ou négocier avec des fournisseurs. « Nous sommes par exemple en contact avec les gens de la direction générale des entreprises, l’organe qui chapeautait en 2013 l’appel à projet d’aide au développement des ateliers de fabrication numérique. »
Pour le moment, les statuts et l’objet de l’asso sont encore en cours d’écriture et de validation par les directions des différents groupes industriels. Accorder 14 labs hétérogènes de groupes industriels ne se fait pas en un claquement de doigt. Fab&co sera financée par les entreprises mères, avec une contribution « de quelques milliers d’euros par labs » selon Mickaël Desmoulins. C’est plus long à mettre en place qu’une asso indépendante, mais ce soutien « donnera plus d’autonomie et de flexibilité au projet, avec la possibilité d’éditer ou de payer une facture au nom de l’asso par exemple, plutôt que de passer par une des entreprises mères », ajoute-t-il, et rendre les processus trop administratifs (comprendre longs et rigides).
Evidemment, ces relations inter-entreprises risquent de soulever des questions de confidentialité. « Pour le moment, nos actions évitent les sujets sensibles, mais la question arrivera certainement », ne cache pas Mickaël Desmoulins. Fab&co aura peut-être le mérite de poser des questions intéressantes sur l’innovation ouverte et la propriété intellectuelle au sein des grandes entreprises.
Les liens se font déjà entre les labs pro : l’équipe du Garage d’Alcatel-Lucent a utilisé la découpe-laser du Creative Lab de Renault, les visites mutuelles se multiplient… Bertrand Marquet et Mickaël Desmoulins ont de la suite dans les idées et de la conviction dans les envies : « On pense à des hackathons inter-entreprises, des prototypes inter-labs, des terrains de jeu inter-industries. Si le Creative Lab de Renault veut faire un atelier sur les objets connectés en 4G, on est déjà connecté avec le Garage d’Alcatel-Lucent. Travailler avec ICI Montreuil et l’Usine IO nous donne aussi une bonne dose d’esprit start-up et prototypage rapide. »
« Je ne dis plus qu’on est un fablab »
Aucun des labs d’entreprises réunis autour de Fab&co n’est signataire de la charte de la Fab Foundation. Mickaël Desmoulins s’interdit de dire que le Creative Lab de Renault est un fablab, « même si nous sommes ouverts à tous nos employés, faisons réellement des choses tangibles, bidouillons, et croyons au potentiel d’innovation de tout employé Renault ».
Il n’empêche, Fab&co souhaite créer des liens avec les labs indépendants. « Par exemple, nous avons fait des ateliers sur la sécurité dans les labs. Une fois documentées, ces ressources ont vocation à être partagées et accessibles à tous en ligne. » (A suivre.)
En revanche, pour intégrer cette asso, il ne suffira pas de s’inscrire, de payer sa cotisation et de venir parler impression 3D. Le lab candidat devra justifier de 4 mois d’existence, être coopté par deux membres, et « favoriser innovation et création de valeur ». « Nous n’intègrerons pas les labs encore en projet ou ceux réservés aux équipes de R&D par exemple. »
Fab&co a déjà son compte Twitter