Makery

Allo l’espace? Ici le Sónar!

Les messages sonores ont été envoyés de Tromsø en Norvège à 12,4 années-lumière de la Terre. © Sónar

Le festival barcelonais Sónar célèbre ses 25 ans… dans l’espace. En envoyant des sons créés par la crème des musiciens électro vers GJ273b, l’exoplanète à 12,4 années-lumière de la Terre.

Sonder le son dans l’espace, c’est l’idée audacieuse façonnée dans les arcanes technologiques de la sous-division Sónar+D du festival barcelonais de musique électronique pour son 25ème anniversaire. Le projet se nomme Sónar Calling GJ273b, du nom de cette exoplanète découverte en 2017 en orbite de l’étoile de Luyten, et l’une des rares à être potentiellement habitable.

Présentation du projet Sónar Calling GJ273b (en anglais):

Après vingt-cinq ans d’exploration sonore électronique de la planète Terre, le festival Sónar a décidé de sonder l’espace en mêlant création artistique et mission scientifique… visant à entrer en contact avec une intelligence extraterrestre. Le projet consiste en l’envoi de trente-huit pièces musicales de dix secondes chacune vers GJ273b. L’envoi par message radio se fait en deux phases, la première a eu lieu en octobre dernier et la seconde se produira les 14, 15 et 16 mai prochains depuis l’antenne télescopique de l’Eiscat (European Incoherent Scatter Scientific Association) à Tromsø en Norvège.

Trois jours pour 2h30 d’un premier envoi dans l’espace. © Sónar

Le premier envoi a été effectué à trois reprises pendant trois jours successifs à la vitesse de 500 bits par seconde (soit 2h30 pour la totalité du message) afin qu’il soit visualisable par d’éventuels astronomes observant la Terre depuis le système étoile de Luyten et que ceux-ci puissent corriger les éventuelles erreurs de réception dues à la distance. Afin d’être « aisément » déchiffrable, la première des pièces expédiées consistait en un tutoriel mathématique à la complexité graduelle, envoyé via un code binaire à deux fréquences d’environ 930MHz. Il donnait les clés de lecture des sources sonores électromagnétiques envoyées en se référant à la fréquence et à la durée des ondes radio, reliant ainsi directement le message à la source scientifique et musicale encodée – la plupart des précédents messages étaient des dessins qui n’avaient donc pas en eux leur clé de compréhension. À sa manière, le message fait presque un clin d’œil cosmique à formule du théoricien des médias Marshall McLuhan : « The medium is the message » !

«Aidez-nous SVP!»

Si le festival espère une éventuelle réponse dans vingt-cinq ans – le temps de trajet aller-retour qui coïnciderait avec son cinquantième anniversaire, comme c’est malin ! – on peut déjà écouter la teneur des différents messages expédiés par nos plénipotentiaires musicaux sur le site dédié.

Le casting est de premier ordre (Modeselektor, Kate Tempest, Ryoji Ikeda, Kode9, Laurent Garnier, etc.) et la diversité de mise, avec des pièces mêlant inspirations mathématiques (le duo anglais Autechre a composé son titre à partir d’un algorithme réunissant les 449 nombres premiers), élans poétiques (les battements de cœur de sa fille captés depuis le ventre maternel par Carsten Nicolai), implications géolocalisées (BFlecha se réfère aux écosystèmes terrestres) et imprécations alarmistes (le message de Laurel Halo équivaut à un « Please help us ! »).

L’astrophysicien Ignasi Ribas (IEEC) à propos de Sónar Calling GJ273b (en anglais):

« Étant donné l’impact largement négatif de l’homme sur la planète, peut-être est-il temps de rechercher une intelligence extérieure – en espérant qu’elle soit supérieure – pour solliciter son aide et ses conseils sur comment changer les choses, explique Enric Palau, l’un des directeurs du festival. Même si les challenges qui nous attendent semblent insurmontables, Sónar Calling est aussi une tentative de redonner un sentiment de conscience général et de réflexion collective sur notre situation actuelle, en espérant que cela débouche sur de nouvelles idées et de nouveaux partenaires – y compris extraterrestres ! ». En matière de collaboratif, et en attendant d’éventuels guests from outer space, le public a été mis à contribution puisque trois des 38 pièces conçues ont été choisies sur concours.

En juin à Barcelone, dans le cadre du Sonar+D, la division « numérique » du festival, le making of du projet sera présenté par deux membres de l’IEEC, l’astrophysicien Ignasi Ribas et l’ingénieur en télécommunications Jordi Portell, auteur du tutoriel permettant aux (éventuels) habitants de l’exoplanète de décoder la musique, ainsi que par l’astrophysicien canadien Yvan Dutil, responsable de la partie technique de la radiotransmission, et deux musiciens ayant participé au projet, la productrice autrichienne Zora Jones et l’artiste islandais Ólafur Arnalds.

Le programme a en effet été concocté avec les très sérieux Institute of Space Studies of Catalonia (IEEC), un institut de recherche qui étudie tous les aspects relatifs à l’espace et aux sciences spatiales, et METI International, une organisation américaine dont le credo est de chercher la meilleure manière d’entrer en contact avec l’intelligence extraterrestre.

De quoi nourrir une réflexion qui sera particulièrement axée exploration spatiale cette année puisque, outre le projet Sónar Calling GJ273b, Sonar+D accueillera la Nasa, le MIT Media Lab ou The Long Now Foundation pour parler d’exoplanètes, de radio-astronomie et des perspectives globales pour les 10.000 ans à venir. Restez connectés à la mission Makery pour en savoir plus !

Le site de Sónar Calling GJ273b, dans le cadre du festival Sónar, 25ème édition, du 14 au 16 juin (Sonar+D, du 13 au 16 juin) à Barcelone