Le Niger, terre de rencontre entre la Culturebox et la Ludobox
Publié le 28 novembre 2016 par DCALK (Paris/Bruxelles)
Une Ludobox dans la valise, dans l’avion en partance pour Niamey et sa Semaine des cultures numériques, une question nous taraude: à quoi ressemble l’engouement maker au Niger?
1 267 000km2 (dont à peine la moitié habitable), enclavé entre le Mali, l’Algérie, la Libye, le Nigeria, le Burkina et le Tchad. En jetant un œil aux grilles de l’ONU, l’Indice de développement humain (IDH) du Niger le classe 188ème pays… sur 193. Autant dire que se connecter à Internet relève ici du défi : le flux égrenant kilooctet après kilooctet de pages internet toujours plus lourdes, le téléchargement de la moindre pièce jointe réclament patience voire persévérance et entêtement… Le monde numérique et les joyeusetés du Web font comme beaucoup là-bas, ils survivent comme ils peuvent.
Tactique des réseaux offline
Nous participons pourtant à la Semaine des cultures numériques, organisée du 8 au 15 octobre par le Centre culturel franco-nigérien (CCFN) de Niamey. Mieux, nous y retrouvons l’équipe d’Éric Durel, bibliothécaire épique (qui a notamment créé et administre le site de ressources Bibliofrance) et grand manitou de l’événement. Dans le programme, Dcalk propose deux ateliers et une conférence pour partager le projet Ludobox de bibliothèque offline de jeux en Print’n Play que nous développons depuis deux ans. Mais la Semaine des cultures numériques promet aussi d’inaugurer le réseau Culturebox : 22 routeurs autonomes déployant un réseau offline de partage de fichiers numériques dans autant de bibliothèques du pays. Entre la Ludobox et Culturebox, une rencontre s’impose !
Idée originale de la médiathèque du CCFN de Niamey, la Culturebox, développée par la société française Mind&Go, est pensée comme un dispositif de médiation culturelle et une possible réponse à une fracture numérique… qui ressemble ici à un gouffre. L’interface de la box est une version user-friendly de la Bibliobox (elle-même déclinaison de la Piratebox) où l’on peut apprécier le travail de veilleur de fond d’Eric Durel : des fiches détaillées pour chaque fichier déposé et des rubriques originales (les discours qui ont marqué l’histoire, une collection de thèses traitant du Niger, etc.).
En effet, si Internet est bien développé dans la capitale, ce n’est pas le cas ailleurs dans le pays. La Culturebox répond plus que jamais à une logique d’accès lorsque la place même de la culture est contestée. En témoigne une des missions actuelles du CCFN : penser la reconstruction de la médiathèque de Zinder, incendiée en janvier 2015 lors d’une manifestation contre Charlie Hebdo.
African Tech in Niger Valley
Au-delà du périmètre de l’Institut français, qu’en est-il des makers au Niger ? Nous avons eu la chance de rencontrer Abdoul Aziz Kountche, passionné d’aéronautique et, en quelque sorte, le Monsieur Drone DiY du Niger. Aziz, 32 ans, a mis au point le T900 en 2012 et son histoire mériterait amplement tout un article. Elle commence sur les bords d’une piste d’aviation et s’alimente du désir de passer son brevet de pilote. Diplôme qu’il finance en donnant des cours de d’aéromodélisme à des enfants, puis, après de nombreux rebondissements, l’amène à concevoir un drone made in Niger pour que, situations d’urgence aidant, il soit finalement mandaté par des ONG (UNHCR, Croix Rouge, etc.) pour créer des relevés cartographiques.
Aujourd’hui à la tête de Drone Africa Service, il propose ses services et son expertise du vol radioguidé tout en dédiant ses week-ends à former des jeunes au club d’aéromodélisme de Niamey. Quand des makers rencontrent des peace makers… On lui tire notre chapeau et lui souhaite de former encore plein de petit rêveurs.
Héros du Sahel
Car des rêveurs au Niger il en faut, et c’est Housseyni Issa Mahaman alias Mog qui l’affirme : « Notre pays a besoin d’espoir et de croire que tout est possible. » Ce jeune enseignant en arts plastiques passe ses nuits à concevoir le premier jeu vidéo 100% nigérien, Les Héros du Sahel. Son pari : une création transmédia autour d’un personnage de fiction décliné en bande dessinée, jeu vidéo et film d’animation. Passionné de manga, il bricole avec son équipe une BD imprimée à la maison qu’il distribue gratuitement dans laquelle est introduite son super héros, « Shamsou, le guerrier du soleil ».
Mog poursuit actuellement le développement du jeu vidéo. En grand fan de Golden Axe et de Final Fight, il propose un beat them all mêlant séquences animées de qualité et jeu de baston, puisant dans les symboles traditionnels de son pays. Les Héros du Sahel est disponible depuis août 2016 à l’essai sur la page Facebook de Mog Media Design.
Retrouvez les précédentes chroniques de Dcalk, association de promotion du jeu en tant qu’objet culturel