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Plantoid, la conscience écologique par l’art blockchain

Inspirée par le «Plantoid», cette corolle sculptée par Isabelle Humbert-Radtke pourrait donner une voix aux arbres. © Nicolas Barrial

«Plantoid» est un projet artistique en réseau génératif conçu par le collectif O’Khaos qui éclaire sur les potentialités de la blockchain, ce système de transactions basé sur la confiance et la responsabilité. L’événement «Learn Do Share» présentait une nouvelle génération de ces étonnantes sculptures le 9 avril à Paris.

Difficile d’expliquer Plantoid, il faut déjà connaître les bases du « minage » du bitcoin, la crypto-monnaie des échanges sécurisés. Le bitcoin est une des versions de la blockchain, la technologie de la chaîne de blocs qui fait sévèrement fantasmer aujourd’hui les investisseurs de l’économie numérique. Mais la blockchain, base de données dont l’historique des transactions est vérifié en peer-to-peer, garantissant ainsi son inviolabilité, stimule également les artistes activistes et promoteurs d’économie circulaire car elle permet de s’affranchir d’une autorité centrale.

Pour résumer, Plantoid met en jeu un réseau génératif et évolutif de sculptures interactives de plantes qui trouvent les moyens de leur évolution dans le minage blockchain. Comme le dit leur site Internet : « Les plantes ont besoin des insectes pour se reproduire… Les Plantoids ont besoin des humains… Envoyez des bitcoins aux Plantoids pour qu’ils puissent embaucher un artiste pour se reproduire… »

Le «Plantoid» originel du collectif O’Khaos (Capture d’écran). © O’Khaos

Neuf mois après la première mouture présentée au festival Ars Electronica de Linz, la plante a effectivement mutée. Et l’événement international sur les nouvelles écritures numériques « Learn Do Share » organisé le 9 avril à l’ESCP Europe de Paris s’appuyait sur Plantoid pour faire comprendre les enjeux de « story telling » que laisse entrevoir la blockchain. Un atelier permettait également d’explorer la genèse des nouveaux rejetons du cyber-végétal.

Comprendre ou pas la blockchain

Nicolas Loubet, co-fondateur de Cellabz, une organisation qui s’est fait une spécialité de décrypter la blockchain, introduisait en conférence le concept des Plantoids. Les sculptures Plantoid sont équipées d’un nano-ordinateur Raspberry Pi et d’une adresse dans la blockchain ce qui permet aux souscripteurs de les alimenter en bitcoins. Une fois un certain montant atteint, le projet génère la possibilité de créer une nouvelle version de la sculpture par l’embauche (et la rémunération) d’un artiste. L’arbre de l’évolution Plantoid peut générer plusieurs branches si le succès est au rendez-vous.

Si la collecte est supérieure à 30 bitcoins, le plantoid fait un petit et l’artiste original gagne 5% de royalties. © Nicolas Barrial

Charge à l’artiste de produire un Plantoid suffisamment séduisant pour attirer les souscriptions et c’est la mission que s’est donnée Isabelle Humbert-Radtke, ingénieure à La Paillasse Saône, fondatrice des Usines Louise, et également sculptrice, qui présentait une nouvelle approche plus organique et écologique de Plantoid. L’artiste et ingénieure envisage ce concept de DAO (organisation décentralisée autonome) comme un prototype pour rendre concret les projets de « smart forest » au travers de son projet « Tree Coach – murmurer à l’oreille des arbres ». Adopter un arbre ne suffit pas en soi, une forêt intelligente impliquerait que les arbres puissent exprimer leurs doléances auprès de la gent humaine.

Isabelle Humbert-Radtke étend le champ d’application de «Plantoid» à des problématiques écologiques. © Nicolas Barrial

Au terme de la conférence, elle invitait les spectateurs à rejoindre un atelier dans l’après-midi animé par les nombreuses fées qui se sont penchées sur les dernier-nés Plantoid, parmi lesquels l’Openlab du CRI, les Bricodeurs, Le CHECy et les Usines Louise.

Contrats de confiance

Pour comprendre comment on passe d’un système de crypto-monnaie à un réseau autopoïétique de cyber-plantes ou encore à une forêt intelligente, Xavier Lavayssière, fondateur des Bricodeurs, était venu débroussailler l’affaire : « La blockchain possède les caractéristiques d’un ordinateur à la Turing (je calcule, je mets ceci en mémoire, etc.) et peut intégrer des programmes plus élaborés qu’une simple transaction de bitcoins. C’est ce qu’on appelle les smart contracts et c’est ce qui permet au Plantoid de se reproduire tout en rémunérant ses artistes. »

Dessin d’étude des «filles» du «Plantoid» d’O’Khaos imaginées par Isabelle Humbert-Radtke. © Nicolas Barrial

De son côté, Isabelle Humbert-Radtke partageait avec les participants les outils qui lui ont permis de « penser la blockchain avec les mains » et élaborer deux « filles » du Plantoid d’Okhaos. Une maquette de la blockchain en bâtonnets et Lego lui permettait d’expliquer les systèmes de vérification des transactions, pendant qu’en bout de table, trônaient les deux Plantoids, deux formes ovoïdales creuses au bout de longues tiges métalliques, remplies de lichen « pour leur donner un aspect plus organique » selon les mots de la conceptrice. 

Les nœuds sont les adresses (un «Plantoid» par exemple), les blocs sont les transactions à vérifier par le mineur. © Nicolas Barrial
Isabelle Humbert-Radtke simule une souscription vers son «Plantoid , le cercle bleu représentant la blockchain. © Nicolas Barrial

En savoir plus sur le «Plantoid» original d’O’Khaos

En savoir plus sur le «Plantoid» nouvelle génération d’Isabelle Humbert-Radtke