Précis de dégooglisation
Publié le 4 juillet 2016 par Elsa Ferreira
Surfer en toute liberté, c’est (encore) possible! Pour éviter les Gmail, Slack et autres Dropbox, qui collectent vos données en échange de leurs services, il existe des alternatives. Guide pas à pas pour reprendre le contrôle.
Chaque année à Pas Sage en Seine, (lire notre compte-rendu ici) les acteurs du libre se réunissent pour nous rappeler qu’un autre Web est possible. L’association Framasoft, créée en 2001 et grosse pointure de la communauté, promeut la « dégooglisation d’Internet ». « On est partis du constat que de plus en plus de gens utilisent des logiciels en ligne, sans trop rien savoir, explique Genma, qui présentait au festival le projet de Framasoft – comme beaucoup de libristes, il utilise un pseudo. Non seulement ces entreprises, américaines pour la plupart, font du profiling publicitaire, mais elles centralisent également l’Internet, ce qui n’était pas l’idée de départ. »
L’association propose donc une alternative libre et éthique aux outils les plus fréquemment utilisés. Tous ne sont pas développés par Framasoft, mais sélectionnés et mis en avant via le préfixe « Frama ». « Framapad par exemple est un Etherpad, explique Genma, mais comme les gens ne savent pas ce que c’est, on donne une cohérence. » L’équipe de Framasoft participe aussi au projet Chatons (Collectif d’hébergeurs alternatifs, transparents, ouverts, neutres et solidaires). « Comme pour les Amap d’agriculture bio, on veut repérer les fournisseurs de confiance et s’organiser en antennes locales. » Comme dans le bio, le produit n’est pas forcément aussi beau, mais il est bien meilleur, file-t-il la métaphore.
Crédo de Framasoft : sortir de l’entre-soi (l’entre-libristes…) pour parler au grand public. « On ne veut pas de logiciels faits par les informaticiens pour les informaticiens. » Framasoft a ainsi publié le 24 juin une série de tutos pour utiliser ces logiciels libres, présenter la gamme de produits et la marche à suivre pour se dégoogliser. Makery s’en inspire pour vous aider pas à pas à vous libérer de l’oligarchie du Web.
Prérequis
Un ordinateur (sous n’importe quel OS –système d’exploitation), un navigateur Internet, de préférence, selon Framasoft, Mozilla Firefox, « respectueux de notre vie privée ». Pour le reste, pas besoin de connaissances particulières en informatique.
Moteur de recherche
Plusieurs alternatives à Google existent. Duckduckgo est probablement la plus connue. Parmi les autres métamoteurs (qui font remonter les infos de plusieurs moteurs de recherche, dont Google ou Yahoo), en version libre, on se tournera vers Searx ou vers celui de Framasoft, Tontonroger.org (qui s’appuie sur Searx). Mais « ses réponses sont moins pertinentes que sur Google, reconnaît Genma, notamment parce qu’il ne sait pas où, ni qui je suis ». Du coup, l’asso recommande plutôt Qwant, le moteur français lancé en 2013, qui affiche de la publicité en lien avec votre recherche immédiate mais ne vous trace pas (pas de cookies, pas de collectes des données de navigation, pas de géolocalisation).
Outils collaboratifs
Google Doc a un concurrent, et c’est du lourd : Slack, lancé en 2014 et évalué à 3,8 milliards de dollars. Parmi ses investisseurs, Google Venture (ou plutôt GV, depuis que Google est devenu Alphabet). Côté logiciel libre, tournez-vous plutôt vers Hackpad, racheté par Dropbox en 2014 et dont le code source est disponible sur Github.
Framasoft propose quant à lui Framapad (d’après Etherpad), mais aussi Framindmap, qui permet de réaliser des cartes mentales ou heuristiques et Framateam, solution de messagerie instantanée.
Repérez-vous en open source
Principal concurrent libre de Google Map : Open Street Map. Lancé en 2004, OSM fonctionne comme un Wikipédia cartographique avec plus d’un million de contributeurs (occasionnels ou réguliers).
Cartes cyclables, réseaux de transport ou pistes de ski, les données brutes sont publiées et réutilisables en licence libre et permettent à tout un chacun de consulter les cartes hors ligne à partir de l’application mobile.
En 2012, le service Foursquare annonçait qu’il quittait Google Map pour le service libre. Si c’est bon pour eux…
Serveur de mails
Le serveur de messagerie électronique est l’un des plus compliqués à mettre en place. D’ailleurs, Framasoft ne s’y est pas frotté. « L’une des difficultés est de reconnaître les spams, explique Genma. Il faut beaucoup de temps et de technique pour arriver à un système performant. » Il conseille plutôt le webmail de Gandi, registrar français fondé en 2000. A 12€ par an et sans pub, le service gère désormais plus d’1,2 millions de comptes mails.
Du cloud libre?
Framasoft propose une alternative à Dropbox avec Framadrop et Framapic (pour les images). Mais ne peut pas « garantir à 100 % sa sécurité » précise Genma : « On met à disposition un coffre fort. Si quelqu’un veut l’ouvrir, il peut y arriver, même s’il doit y aller avec un chalumeau. »
Le tuto Framadrop:
Le mieux, c’est d’héberger soi-même ses données. C’est ce que propose la Fédération FDN avec La Brique, un serveur couplé à un VPN (réseau virtuel privé) qui héberge vos fichiers. Une fois branché à votre fournisseur d’accès à l’Internet (FAI), l’appareil rend votre navigation illisible pour celui-ci. Prix libre, à partir de 60€.
Lima propose le même genre de service avec sa clé USB qui fait office de cloud personnel et synchronise tous vos appareils. En 2015, la start-up française a recueilli sur Kickstarter plus de 1,2 millions de dollars. Depuis sa commercialisation en novembre 2015, Lima a 40 000 utilisateurs, mais ne permet pas (encore) de partager ses fichiers avec d’autres personnes. Prix: 99€.
Raccourcir vos liens
Saviez-vous qu’à chaque fois que vous raccourcissez un lien, Bitly analyse vos données ? Pour contrer le service américain, Framasoft a lancé Huit.re. Vous pouvez aussi vous tourner vers le service de Canard PC. Petitlien, lui, est mort.
Protéger vos secrets
Framabin vous permet de crypter vos messages, et ainsi transmettre un mot de passe, un numéro de carte bancaire ou toute autre donnée sensible.
Le tuto Framabin:
Si vous êtes lanceur d’alerte ou journaliste, on conseille plutôt Globaleax, un logiciel open source créé par une fondation italienne et écrit (entre autres) par l’un des fondateurs de Tor, spécialement conçu pour faciliter le travail des lanceurs d’alerte.
Retrouvez tous les tutos des «Framachins» pour mieux se dégoogliser